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HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

que vous avez quelque chose. Je vous prie de ne pas me croire indiscret ou importun, mais je suis sûr de cela.

Margaret fit un geste de dénégation.

— Alors je me trompe ? — dit Clément d’un ton interrogateur.

— Assurément. Je n’ai pas de motifs d’ennui bien déterminés. Je suis seulement un peu inquiète de mon père qui est absent depuis bientôt quinze jours. Cependant il n’y a rien là dedans d’extraordinaire ; il s’absente souvent. Malgré cela, je suis sans cesse dans des transes à son sujet. Lorsqu’il reviendra, je serai certainement grondée par lui pour cela.

Le soir du 27 août, Margaret donna sa leçon accoutumée et, comme à l’ordinaire, resta quelque temps à causer avec Mme Austin, qui avait pris en grande affection le professeur de piano de sa petite-fille. Clément avait insensiblement supprimé ses promenades du soir, surtout les jours de leçons. Il prenait part à la conversation, et comme on parlait de toutes sortes de choses, il n’est pas étonnant qu’on vînt à causer de l’assassinat de Winchester.

— À propos, mademoiselle Wentworth, — s’écria Mme Austin, interrompant son fils, — je suppose que vous avez appris la nouvelle de cet affreux assassinat qui fait tant de bruit ?

— Un affreux assassinat… non, madame ; j’apprends rarement des choses de ce genre, car la personne avec qui je loge est vieille et sourde. Elle s’inquiète fort peu de ce qui se passe dans le monde, et je suis trop occupée pour m’en inquiéter moi-même.

— Ah ! — dit Mme Austin. — Eh bien ! ma chère enfant, vous me surprenez réellement. Je croyais que cette terrible affaire avait eu un grand retentissement à cause du célèbre M. Dunbar qui s’y trouve mêlé.

M. Dunbar ! — s’écria Margaret regardant son interlocutrice avec des yeux dilatés par l’étonnement.