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HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

une foule d’autres éparpillés sur une table. Elle le plia et le tendit à Margaret.

— Donnez un verre de madère à Mlle Wentworth, mère, — s’écria Clément. — Je suis sûr que cette conversation à propos de meurtre l’a fort émue.

— Non, non, pas du tout ! — répondit Margaret. — Je préférerais ne rien prendre. Je désire rentrer au plus vite. Bonsoir, madame Austin.

Elle sortit du salon avant que la veuve pût insister auprès d’elle, mais Clément la suivit dans le vestibule.

— Mademoiselle, — dit-il, — je sais que quelque chose vous a agitée. Je vous en prie, revenez au salon et attendez que vous soyez plus calme.

— Non… non… non…

— Laissez-moi vous accompagner jusque chez vous, alors.

— Oh ! non… non… — s’écria-t-elle en voyant le jeune homme se mettre en travers de la porte, — par pitié ne me retenez pas, monsieur Austin, ne me suivez pas !

Elle passa à côté de lui et s’éloigna précipitamment de la maison. Il la regarda disparaître dans le crépuscule et revint ensuite au salon en soupirant.

— Je n’ai pas le droit de la suivre malgré elle, — se dit-il, — je n’ai pas le droit de m’imposer à elle, ou de m’occuper d’elle.

Il se jeta dans un fauteuil et prit un journal, mais il n’en lut pas six lignes. Il réfléchissait profondément pendant que ses yeux étaient fixés sur la page.

— Pauvre fille, — se dit-il à lui-même au bout d’un moment, — pauvre fille abandonnée ! Elle est trop pure et trop belle pour rester exposée au rude contact du monde.

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Margaret parcourut rapidement la distance qui la séparait de son logis. Elle tenait le journal plié forte-