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HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

a dit à M. Dunbar qu’il était libre, — dit l’employé ; — mais sir Arden a imposé silence. « Il n’est pas nécessaire de battre des mains, a-t-il dit. Il n’y a qu’à se lamenter de ce qu’un crime pareil ait été commis et que le coupable ait échappé. » Un jeune homme qui était à l’audience m’a dit que c’étaient là les paroles de sir Arden.

Ils étaient en ce moment arrivés à la demeure de sir Arden. La maison était très-belle, quoiqu’elle fût située dans une rue latérale : et un domestique à l’air grave, portant une jaquette en coutil, fit entrer la jeune fille dans un vestibule à panneaux de chêne.

Elle aurait eu peut-être quelque difficulté à voir sir Arden, si l’employé n’eût aussitôt annoncé le but de sa visite. Mais le nom de l’homme assassiné fut un talisman, et on introduisit la jeune fille dans une salle basse, garnie d’étagères pleines de livres, qui ouvrait sur un jardin dessiné à l’ancienne mode.

Sir Arden Westhorpe, le magistrat, était assis devant un bureau dans cette salle. C’était un homme âgé, à cheveux et à favoris gris et à figure un peu sévère. Mais il était bon et juste, et Dunbar eût-il été l’empereur d’une moitié de l’Europe, au lieu d’être un riche banquier, que sir Arden l’eût aussi bien mis en accusation si la justice l’avait exigé.

Margaret ne fut nullement décontenancée par la présence du magistrat. Elle n’avait à l’esprit qu’une pensée, la pensée de la mort violente de son père, et elle eût parlé librement devant un roi.

— J’espère que je n’arrive pas trop tard, monsieur, — dit-elle. — J’apprends que M. Dunbar a été relâché. J’espère qu’il sera temps encore pour témoigner contre lui.

Le magistrat la regarda avec surprise.

— Ceci dépendra des circonstances, — dit-il, — c’est-à-dire de la nature de la déposition que vous avez à faire.