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HENRY DUNBAR

Le magistrat appela son greffier d’une chambre voisine et reçut la déposition de la jeune fille.

Mais il secoua la tête d’un air de doute quand Margaret eut raconté tout ce qu’elle savait. Ce qui, pour la jeune fille toute d’impulsion, semblait une preuve positive de la culpabilité de Dunbar, n’était pas grand’chose une fois résumé par le clerc expérimenté de sir Arden.

— Vous savez que votre malheureux père a été lésé par M. Dunbar, et vous croyez qu’il possédait des secrets nuisibles à ce gentleman ; mais vous ignorez ces secrets. Ma pauvre enfant, je ne puis agir dans cette circonstance à l’aide de votre témoignage. La police est à l’œuvre. Cette affaire ne sera pas étouffée sans qu’on ait fait de sérieuses recherches, croyez-moi. J’aurai soin de confier votre déposition à l’agent de la police secrète qui aura à s’occuper de tout cela. Il nous faut attendre. Je ne puis me résoudre à croire que Dunbar ait commis cet horrible crime. Il est assez riche pour avoir pu acheter le silence de votre père, s’il avait lieu de craindre ses aveux. L’argent est un levier puissant auquel rien, presque rien ne résiste. Il est rare qu’un homme, maître d’une fortune sans limites, se trouve forcé de recourir à la violence.

Le magistrat lut à haute voix la déposition de Margaret et la jeune fille la signa ensuite en présence du clerc ; elle la signa du vrai nom de son père, ce nom dont elle ne s’était jamais, servi jusqu’à ce jour.

Puis, après avoir donné au magistrat son adresse de Wandsworth, elle le salua et se retira.

Rien de ce qu’avait dit sir Arden n’avait affaibli en elle la conviction enracinée de la culpabilité de Dunbar. Elle croyait toujours qu’il était le meurtrier de son père.

Elle fit quelques pas sans savoir oh elle allait, puis elle s’arrêta tout à coup ; sa figure s’anima, ses yeux