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HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

des feuilles jaunies tombaient dans le ruisseau au fond duquel le cadavre avait été jeté.

Un peu plus tard, dans l’après-midi, Margaret prit le chemin du cimetière situé hors de la ville où le défunt reposait sous le gazon fraîchement remué.

Un grand nombre de personnes étaient allées visiter cette tombe et avaient été fort désappointées en trouvant qu’elle ressemblait tout à fait aux autres.

Déjà les bons habitants de Winchester avaient commencé à faire courir le bruit que le petit bois près de Sainte-Cross était hanté, et on disait vaguement que le mort y avait été vu se promenant à l’heure du crépuscule.

Au moment même où dix heures sonnaient, Margaret se présenta à l’Hôtel George, ainsi que le lui avait fait dire Dunbar.

Elle avait passé une triste nuit dans une humble auberge un peu en dehors de la ville, et son sommeil n’avait été qu’un long rêve sur sa rencontre avec Dunbar. Dans ces rêves sans suite elle s’était constamment trouvée avec le riche banquier tantôt dans un endroit, tantôt dans un autre, mais toujours dans des lieux impossibles et sans jamais voir sa figure. Elle avait essayé de la voir, mais de façon ou d’autre elle n’avait jamais pu y parvenir. On aurait dit que le diable s’en mêlait.

Le même garçon flânait dans la même attitude à la porte de l’hôtel. Il releva la tête avec un air de surprise, quand Margaret s’approcha de lui.

— Vous n’êtes donc pas partie, mademoiselle ? — s’écria-t-il,

— Partie ! non, j’ai attendu pour voir M. Dunbar.

— Tiens, voilà qui est drôle, — dit le garçon ; — vous avait-il fait dire qu’il voulait vous voir ?

— Oui, il m’avait promis une entrevue pour ce matin à dix heures.