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HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

monceau d’or aux courses d’été de Liverpool, et je comptais bien retirer ces billets. Je n’avais pas l’intention de les laisser présenter ; non, je vous le promets. — Henry, dit M. Hugh d’un ton très-solennel, neuf hommes sur dix qui font ce que vous avez fait pensent comme vous avez pensé ; ils croient pouvoir se soustraire aux conséquences de leurs actes. Ils agissent sous la pression du moment. Ils n’ont pas l’intention de malfaire… ils ne songent pas à voler six pence à qui que ce soit. Mais ce premier pas fatal est le point de départ de la grande route qui mène aux galères, et ce qui peut arriver de plus fâcheux à un homme, c’est de réussir dans son premier crime. Heureusement pour vous, vous avez été promptement découvert. Pourquoi avez-vous commis cette mauvaise action ? » Lejeune homme balbutia quelques excuses sans suite sur ses pertes du turf et sur les dettes d’honneur qu’il était forcé de payer. Alors M. Hugh lui demanda si la signature avait été contrefaite par lui ou par un autre. Le cornette hésita un moment et avoua ensuite à son oncle le nom de son complice. Je regardai cet aveu comme lâche et cruel. Il avait tenté mon frère, et le moins qu’il devait faire, c’était de ne pas faire retomber la faute sur lui. On envoya l’un des garçons de la banque, à la recherche du jeune Joseph. Une heure après, mon frère arriva à la maison, et il fut amené tout droit dans le cabinet où nous l’attendions en silence. Il était aussi pâle que son maître, mais il ne tremblait pas. En somme, il avait l’air plus déterminé que M. Henry. M. Hugh lui reprocha ce qu’il avait fait. « Niez-vous, Wilmot ? lui demanda-t-il. — Non, répondit mon frère en regardant le cornette avec mépris ; puisque mon maître m’a trahi, je ne nierai rien. Mais j’espère bien que nous réglerons nos comptes quelque jour, lui et moi. — Je ne vais pas poursuivre mon neveu, reprit M. Hugh, c’est vous dire que vous ne serez pas poursuivi non plus ; mais je crois que vous