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HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

c’était un fort bel homme, très-élégant, et que sa fille était un ange rendu plus angélique encore par cette qualité toute mondaine : un demi-million ou à peu près de dot.

Pendant ce temps Margaret vivait seule dans son humble logement et ses tristes pensées se reportaient sur le père qu’elle avait perdu.

Il n’avait pas été bon père, mais elle l’avait aimé quand même. Elle avait eu pitié de lui à cause des malheurs qui l’avaient frappé et du tort qu’on lui avait fait. Elle l’avait aimé à cause des faibles indices d’un naturel meilleur que son caractère avait parfois laissé percer.

— Il n’a pas toujours été un faussaire et un réprouvé, — se disait la jeune fille en réfléchissant sur la destinée de son père. — Il n’aurait jamais été coupable sans Henry Dunbar.

Elle se souvenait avec amertume de l’aspect extérieur de la maison du banquier dans Portland Place. Elle avait entrevu la splendeur qui y régnait le soir qui suivit son retour de Winchester. Elle avait vu briller des peintures et des statues à la lueur de la lampe allumée dans le premier compartiment du vestibule. Elle avait vu dans ce court instant une brillante confusion de fleurs exotiques, de rideaux de satin, de moulures dorées, de panneaux peints à la fresque, les quelques premières marches d’un escalier en marbre et les fines ciselures de la rampe en bronze.

Un seul instant seulement elle avait entrevu la splendeur intérieure de la maison de Henry Dunbar, mais les objets entrevus dans ce rapide coup d’œil s’étaient gravés dans sa mémoire.

— Il est riche, — songeait-elle, — et on dit que la fortune peut acheter les meilleures choses de la terre. Mais après tout il existe bien peu de choses réelles qu’elle puisse se procurer. Elle peut acheter la flatte-