Page:Braddon - Henry Dunbar, 1869, tome I.djvu/19

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
15
HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

choses que la Providence vous a prodiguées. Vous avez commencé la vie au sommet de l’arbre, et il vous a plu de redescendre à terre. Il vous faudra recommencer à monter en partant cette fois du bas de l’échelle. Vous vendrez votre commission et vous partirez pour l’Inde sur le premier navire qui mettra à la voile à Southampton. Nous sommes au 23 du mois d’août, et je vois dans la Gazette maritime que l’Oronoko est en partance au 10 septembre. Vous n’aurez de cette façon qu’un peu plus d’une quinzaine pour faire vos préparatifs. » Le jeune cornette sauta sur sa chaise. « Vendre ma commission ! s’écria-t-il ; aller dans l’Inde ! Vous n’y songez pas, mon oncle, certainement vous n’y songez pas. Mon père, vous ne me contraindrez pas à cela. » Percival n’avait pas une seule fois levé les yeux sur son fils depuis que le jeune homme était entré dans le cabinet. Il était demeuré assis, le coude appuyé sur le bras du fauteuil et la figure cachée dans sa main. Il n’avait pas dit une parole. Il ne parla pas non plus en ce moment, malgré l’appel de son fils. « Votre père m’a donné plein pouvoir en cette affaire, dit M. Hugh. Je ne me marierai jamais, Henry, et vous êtes mon seul neveu et mon héritier reconnu. Mais je ne laisserai jamais ma fortune à un homme déshonnête ou déshonoré, et c’est à vous de prouver que vous êtes digne de mon héritage. Vous recommencerez la vie à nouveau. Vous avez joué l’homme à la mode, et vos aristocratiques compagnies vous ont conduit à ce résultat. Il faut dire adieu au passé, Henry. Je vous reconnais le droit de choisir par vous-même entre ces deux alternatives : vendre votre commission, aller dans l’Inde, et entrer dans la succursale de notre maison à Calcutta en qualité de commis, ou refuser en renonçant à la fortune de votre père et à la mienne. » Le jeune homme garda le silence pendant quelques minutes, puis il dit