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HENRY DUNBAR

je suis connu sous le nom de Vavassor. Mais je n’ai rien de semblable à une ombre. Trouvez-moi un nom qui commence par un V. Il vaut tout autant s’en tenir à son initiale à cause de la marque du linge.

À en juger par le peu de linge visible dans la toilette du Major, une personne méchante aurait pu s’imaginer que l’article chemise était un luxe inconnu à la garde-robe de ce gentleman.

— Appelez-moi Vernon, — dit-il. — Vernon est un beau nom. Vous pouvez dire Major Vernon. Mes amis du coin, pas celui de Piccadilly, mais celui du champ qui se trouve derrière Field Lane, m’ont fait l’honneur de m’élever au rang de Major. Je ne vois pas pourquoi je ne garderais pas ce titre. Mes goûts sont complètement aristocratiques. Je n’ai aucun talent d’assimilation avec la canaille. Ceci est le genre de vie qui me va. Ici je suis dans mon élément.

Dunbar avait conduit sa connaissance en habits râpés dans le salon à plafond bas tapissé où d’habitude il passait son temps. Le Major se frotta les mains avec un geste de béatitude en regardant les preuves de richesse éparpillées à profusion dans l’appartement. Il poussa un long soupir de satisfaction en se laissant tomber brusquement sur un fauteuil à ressort placé au coin du feu.

— Maintenant, écoutez-moi, — dit Dunbar, — je n’ai pas le temps de vous parler ce matin, j’ai d’autres devoirs à remplir. Quand je les aurai terminés, je reviendrai vers vous. En attendant, vous pouvez rester ici tant que vous voudrez et demander ce qu’il vous plaira de manger ou de boire.

— Bien !… Je ne refuse pas une aile de poulet et une bouteille de bourgogne. Il y a longtemps que je n’ai goûté de bourgogne. Du chambertin ou du clos Vougeot à douze shillings la bouteille, voilà ce qui me convient… qu’en dites-vous ?