Page:Braddon - Henry Dunbar, 1869, tome I.djvu/51

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
47
HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

payer ce dont j’ai besoin. Appelez votre maître, ou plutôt non, vous ferez tout aussi bien l’affaire vous-même. Je veux une toilette complète, depuis le chapeau jusqu’aux souliers, comprenez-vous ?

— Peut-être quand j’aurai vu l’argent, — répondit le jeune homme d’un ton narquois.

— Vous êtes déjà au courant des habitudes du monde, mon garçon, n’est-ce pas ? — dit Joseph avec amertume ; puis tirant ensuite le portefeuille de sa poche, il l’ouvrit et exhiba la petite liasse de billets de banque. — Je présume que vous comprenez ceci ? — dit-il.

Le nonchalant jeune homme releva son nez qui, par sa conformation naturelle, annonçait un caractère ambitieux, et regarda son chaland d’un air incrédule.

— Je comprends que ceci peut être faux, — fit-il d’un air significatif.

Joseph lâcha un juron et s’élança sur le jeune commis.

— J’ai dit qu’ils pouvaient être faux, — fit observer le jeune homme avec moins d’arrogance, — il n’y a pas de quoi vous précipiter sur moi, je n’ai pas eu l’intention de vous offenser.

— Non ! — murmura Wilmot, — vous faites ma foi bien de n’avoir pas cette intention. Appelez votre patron.

Le jeune homme s’éloigna pour obéir ; il était tout à fait souple maintenant.

Joseph examina la boutique.

— Le roquet ! il a oublié la caisse ! — murmura-t-il ; — je pourrais essayer de l’ouvrir si… (il s’arrêta et sourit d’une étrange manière fort peu agréable à voir), si je n’allais pas à la rencontre de Henry Dunbar.

Il y avait une glace à pied dans un coin de la boutique. Joseph s’en approcha, se contempla en silence pendant quelques instants, puis montra le poing à son image :