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HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

comme il peut se faire que vous ne soyez pas disposé à avoir en moi plus de confiance que votre chien couchant de commis, bien que vous soyez extrêmement poli, voici ce que je vais faire. Je désire faire friser et tailler ma barbe. Je me rends chez un barbier pour cela et pendant ce temps vous pouvez aller aux informations sur ces gentlemen.

Il tendit au patron trois de ses billets de la Banque d’Angleterre. Le marchand les regarda d’un air de doute.

— Si vous croyez qu’ils sont faux, envoyez-les à un de vos voisins et faites-les changer, — dit Joseph ; — mais dépêchez-vous, car je vais revenir dans une demi-heure.

Il sortit de la boutique, laissant le patron, toujours incertain, avec les trois billets dans la main.

Le vagabond rabattit son chapeau sur ses yeux, fourra ses mains dans ses poches, et descendit la Grande-Rue jusqu’à une boutique de barbier, près des docks.

Là il se fit couper la barbe et arranger sa moustache inculte de la manière la plus aristocratique. Ses longs cheveux gris mal peignés furent taillés et frisés d’après ses propres indications.

S’il eût été vaniteux et s’il n’avait eu d’autre but dans la vie que celui d’embellir sa personne, il n’eût pas été plus minutieux ou plus difficile à contenter.

Quand le barbier eut complété son œuvre, Joseph se lava la figure, ramena ses cheveux sur son large front, et se regarda dans un petit miroir à barbe suspendu au mur.

Comme tête et figure, la transformation était complète. Il n’était plus un vagabond, mais bien un gentleman respectable, entre deux âges, de belle mine, et non sans une certaine distinction aristocratique.

L’expression même de sa physionomie était changée.