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HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

Il était vieux, mais il paraissait bien plus vieux qu’il ne l’était réellement. Ses cheveux étaient blancs et descendaient en longues mèches grêles sur le collet de son paletot râpé couleur vert de bouteille. Il portait un paletot d’hiver, quoiqu’on fût au milieu de l’été et qu’il fît une chaleur insupportable. Sa figure était desséchée et ridée, ses yeux bleus, ternes et obscurcis. Il était faible, et ses mains étaient continuellement agitées par un tremblement nerveux. Deux fois déjà il avait eu une attaque de paralysie, et il savait que lorsque la troisième arriverait, elle lui serait fatale.

Il n’avait cependant pas grand’peur de la mort, car sa vie avait été sans plaisirs et s’était écoulée au milieu d’un travail continuel et monotone que n’avaient allégé ni les joies d’un intérieur, ni les distractions de la société. Ce n’était pas un mauvais homme, car il était honnête, consciencieux, industrieux et persévérant. Il habitait un pauvre logement dans une ruelle étroite, près de la banque, et il assistait deux fois par dimanche aux offices de l’église Saint-Gundolph.

À sa mort, il espérait être enterré sous les dalles de cette église et reposer à proximité de l’or que contenaient les caves de la banque.

Les trois hommes s’étaient réunis dans ce triste bureau particulier, après les heures de travail, pour s’y entretenir, malgré la chaleur de la soirée d’août, d’un événement assez important : la réception de Henry Dunbar, le nouveau chef de la maison.

Cet Henry Dunbar était absent d’Angleterre depuis trente-cinq ans, et aucun des employés actuels de la banque, à l’exception de Sampson Wilmot, ne l’avait jamais vu.

Il était parti pour Calcutta trente-cinq ans auparavant, et depuis lors il y avait toujours été employé dans la succursale de la banque, d’abord comme commis, plus tard comme chef et directeur. Il avait