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HENRY DUNBAR

Dunbar s’éloigna en marmottant, et le bedeau, renonçant à son thé, attendit consciencieusement. Il attendit jusqu’à ce que l’horloge de la cathédrale sonnât neuf heures et que les étoiles fussent dans tout leur éclat sur la voûte bleu sombre du ciel au-dessus de sa tête ; mais il attendit en vain, Wilmot ne revint pas des Fougères.

Le banquier rentra à l’Hôtel George. Une petite table ronde était dressée dans un joli salon du premier étage. Les verres et l’argenterie étincelaient à la lueur de cinq bougies brûlant dans un candélabre en argent, et le garçon commençait à s’inquiéter à cause du poisson.

— Vous pouvez contremander votre dîner, — dit Dunbar avec une contrariété visible, — je ne dînerai pas tant que M. Wilmot, qui est mon domestique de confiance…, je pourrais presque dire mon ami… ne sera pas de retour,

— Est-il allé loin, monsieur ?

— Aux Fougères, à un mille au-delà de Sainte-Cross. Je retarderai mon dîner à cause de lui. Placez deux bougies sur cette table et apportez-moi mon buvard.

Le garçon obéit ; il plaça deux bougies sur la table et apporta le buvard, ou plutôt le pupitre qui avait coûté quarante livres et était garni de tout ce qui peut être utile à un homme d’affaires, et de tous les objets élégants et coûteux que le voyageur le plus ambitieux puisse désirer. Ce nécessaire, comme tout ce que possédait Dunbar, était marqué au coin d’une richesse incalculable.

Dunbar tira de sa poche un trousseau de clefs et ouvrit le pupitre. Cette opération demanda un peu de temps, car il eut de la difficulté à trouver la bonne clef. Il releva la tête et regarda en souriant le garçon qui rôdait autour de lui en cherchant à se rendre utile.

— Il faut que j’aie bu trop de Moselle à déjeuner, — dit-il en riant, — ou du moins mes ennemis pour-