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HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

de fer, vous avez tiré trois fois une lettre de votre poche, et, de temps en temps, quand vous lisiez, vous me regardiez avec hésitation et votre regard semblait complètement indécis. Vous pensiez que pendant tout le temps je regardais par la fenêtre, très-intéressé par la vue des champs de blé que nous traversions alors ; mais, monsieur Austin, si je n’étais pas capable de regarder par la fenêtre et de vous observer en même temps, je ne vaudrais pas un grain de sel ni pour vous ni pour les autres. J’ai vu assez clairement que vous aviez envie de me montrer cette lettre, et il n’était pas bien difficile de deviner que cette lettre avait quelque rapport avec l’affaire qui nous a amenés à Winchester.

« M. Carter s’arrêta et s’étaya contre l’angle de la cheminée. Je n’étais pas surpris qu’il eût deviné mes pensées dans le chemin de fer. Je réfléchis sérieusement sur ce sujet. Il avait raison, en somme, sans aucun doute, mais comment pouvais-je raconter à un agent de police mes plus chers secrets… la triste histoire de mon unique amour !

« — Ayez confiance en moi, monsieur Austin, me dit mon compagnon ; si vous avez besoin que je vous serve, ayez entière confiance. Cette même chose que vous me cachez peut être la clef que j’aurais le plus besoin de tenir.

« — Je ne crois pas cela, lui dis-je. Cependant j’ai toute raison de vous croire un homme consciencieux et honnête, et je me fierai à vous. Je crois que vous devez vous demander pourquoi je m’intéresse autant à cette affaire ?

« — Eh bien ! pour dire la vérité vraie, monsieur, il paraît assez extraordinaire de voir un homme indépendant comme vous prendre tant de peine pour découvrir le vrai et le faux d’un meurtre commis il y a près d’un an, à moins que vous ne soyez un