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HENRY DUNBAR

parent de la victime ; et même si cela était, vous seriez bien différent de l’espèce des parents ordinaires, car ordinairement ils prennent cela d’une façon plus paisible que toute autre personne, répondit M. Carter.

« Je dis à l’agent que jamais de ma vie je n’avais vu l’homme assassiné, et que je n’avais jamais entendu prononcer son nom avant le meurtre.

« — Alors, monsieur, je puis dire que je ne comprends pas le motif qui vous fait agir, dit M. Carter.

« — Eh bien ! monsieur Carter, je crois que vous êtes un brave homme, et je veux me fier à vous, lui dis-je. Mais pour cela, il faut que je vous raconte une longue histoire, et, ce qui est pis encore, une histoire d’amour.

« Je sentis que je rougissais un peu en disant ceci, et je fus tout honteux de cette fausse pudeur qui amenait cet incarnat sur mes joues.

« M. Carter s’aperçut de mon embarras et fut assez aimable pour m’excuser.

« — Ne soyez pas effrayé de me raconter cette histoire parce qu’elle est sentimentale, dit-il, car croyez-en ma parole, j’en ai joliment entendu des histoires d’amour. Il est bien peu d’affaires qui s’offrent à nous qui, si nous les sondions, ne nous feraient découvrir un cotillon au fond. Vous vous rappelez l’Oriental qui demandait toujours : « Qui est-elle ? » quand il entendait parler d’un combat ou d’un feu, ou d’un taureau furieux qu’on avait laissé s’échapper, ou de toute autre légère calamité de ce genre ; parce que, d’après ses aperçus, il y avait toujours une femme au fond de toutes les mauvaises choses qui arrivaient sur cette terre. Eh bien ! monsieur, si ce potentat oriental avait vécu de nos jours et avait été élevé dans la carrière de la police, que je sois pendu s’il aurait eu besoin de changer d’opinion.