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HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

son père… de l’homme qu’elle savait avoir été l’ennemi de son père ?

« — Non, répondis-je résolûment, je suis sûr qu’elle est incapable d’une telle bassesse. L’idée qu’elle a été achetée est venue à mon esprit dans la première amertume de ma colère, mais, même alors, je repoussais cela comme incroyable. À présent que je puis penser froidement à ce sujet, je sais qu’une pareille alternative est impossible. Si Margaret a été influencée par Dunbar, c’est par la crainte seule qu’il aura agi. Dieu sait de quoi il aura menacé la malheureuse enfant ! L’homme qui a pu attirer son vieux domestique dans un bois solitaire et l’y assassiner, l’homme qui jamais n’a senti une étincelle de pitié pour l’instrument et le complice du crime de sa jeunesse, pour l’humble ami qui sacrifiait un nom sans tache dans le but de servir son maître, a dû éprouver peu de remords à torturer une jeune fille sans défense qui osait se présenter devant lui comme une accusatrice.

« — Mais vous dites que Mlle Wilmot était résolue et avait l’esprit très-monté. Est-il probable que cette personne ait été de nature à se laisser dominer par la crainte que lui aurait inspirée M. Dunbar ! Quelle menace aurait-il pu employer pour l’épouvanter ?

« Je secouai la tête d’une façon désespérée.

« — J’en suis aussi ignorant que vous, lui dis-je, mais j’ai des raisons puissantes pour croire que Margaret était sous l’influence d’une grande frayeur quand elle revint de Maudesley Abbey.

« — Quelles raisons ? demanda M. Carter.

« — Son ton démontrait suffisamment qu’elle avait été effrayée. Son visage était blanc comme un linge quand je la rencontrai, elle tremblait et s’éloigna de moi comme si ma présence était horrible pour elle.

« — Pourriez-vous essayer de répéter ce qu’elle a dit ce soir-là et le matin suivant ?