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HENRY DUNBAR

complètement éclairée. Au moment où elle s’éloigna, la lune était voilée par un nuage opaque, et la rue était pleine d’ombre. Je ne pus donc la voir qu’un instant distinctement. Quant à son visage, je ne pus l’apercevoir.

« Je retournai à l’hôtel, et m’étant assis près du feu, j’essayai de lire un journal ; mais il me fut impossible d’enchaîner mes pensées à cette lecture. M. Carter rentra un peu avant onze heures. Il était très-gai et but un grand verre de grog avec une complète satisfaction. Mais de quelque manière que je le questionnasse, je ne pus rien tirer de lui, sinon qu’il voulait rechercher les vêtements du défunt.

« Je lui demandai ce qu’il en voulait faire et quel avantage il en tirerait s’il les trouvait ; mais il se borna à hocher la tête d’un air capable et me dit d’attendre.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

« Aujourd’hui a été une malheureuse journée, une journée de découvertes horribles. Et cependant j’y ai trouvé quelque consolation, car ce que j’ai appris a justifié ma foi dans la femme que j’aime.

« La matinée était froide et humide. Pas un rayon de soleil dans le ciel gris, et le plat paysage au delà de la cathédrale semblait presque effacé sous la pluie battante. Seules, les collines majestueuses et immuables perçaient les brouillards et figuraient les limites d’un pays submergé.

« Nous déjeunâmes à la hâte et de bonne heure. Si tranquilles et si réfléchies que fussent d’ordinaire les allures de l’agent de police, je vis cependant qu’il était ému. Il ne prit rien qu’une tasse de thé, quelques bouchées de pain rôti, puis il saisit son chapeau et son pardessus.

« — Je vais, me dit-il, au quartier général de la police du comté. Il me faudra révéler le but qui m’a