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HENRY DUNBAR

« M. Carter me regarda avec un sourire singulier sur le visage.

« — Vous faites des progrès, monsieur Austin, me dit-il. Avant peu, vous ferez un agent de police de première force.

« Je n’acceptai ce compliment qu’avec défiance, car il y avait dans le ton de M. Carter quelque chose qui ressemblait à de l’ironie.

« — Je vais vous dire ce que je pense, me dit-il tout à coup en m’arrêtant par la boutonnière. Je crois savoir pourquoi on a arraché à la victime son habit, son gilet et sa chemise.

« Je priai l’agent de police de me dire sa pensée sur ce sujet, mais il refusa de me satisfaire.

« — Attendez et regardez, dit-il. Si je suis dans le vrai, vous verrez bientôt ce que je veux dire ; si j’ai tort, je garderai mes pensées pour moi. Je suis un vieux renard, et je ne me soucie pas d’être pris en défaut.

« Je n’ajoutai rien après cela. La disparition des vêtements de la victime m’avait toujours paru la seule circonstance inconciliable avec la culpabilité de Dunbar. Que quelque misérable se fût souillé d’un crime pour arracher à sa victime des objets de mince valeur, cela était encore vraisemblable. Mais que Dunbar, l’homme riche, l’Anglo-Indien, l’ultra-raffiné, dépouillât le corps de son valet et profanât un cadavre, me semblait chose incroyable, et je ne voyais aucune hypothèse qui pût l’expliquer.

« C’était le seul point qui, depuis le commencement, m’avait complètement dérouté.

« Nous trouvâmes le dragueur qui nous attendait sous les arbres, ruisselant d’eau. M. Carter s’était révélé aux gens de la justice du pays comme l’un des flambeaux de Scotland Yard, et s’il lui avait pris fantaisie de creuser sous les fondations de la cathédrale,