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HENRY DUNBAR

courais les paisibles rues de la ville, espérant à chaque recoin de rue, à chaque bruit de pas résonnant sur le pavé, revoir la silhouette de la nuit précédente. Mais, en quelque endroit que j’allasse, je ne vis personne qui lui ressemblât, et je retournai enfin à l’hôtel m’asseoir seul au coin de mon triste feu et écrire le récit de mon labeur de la journée. »

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Tandis que Clément était assis dans son salon solitaire à l’Hôtel George, et que sa plume courait rapidement sur le papier, une femme parcourait le quai de départ éclairé de la station de Rugby, attendant le train d’embranchement qui devait la conduire à Shorncliffe.

Cette femme était Margaret, la jeune femme aux traits hagards et enfiévrés, dont les allures si changées avaient terrifié la bonne Mme Austin.

Mais alors elle ne tremblait pas. Elle avait rejeté en arrière son voile épais ; et quoique les couleurs de la santé ne fussent pas revenues animer ses joues et ses lèvres, ses traits avaient une expression de résolution immuable, et son regard était fixe comme celui d’une personne qui a un dessein en vue, et qui ne veut ni se détourner ni faiblir avant que ce dessein soit exécuté.

Il n’y avait qu’un vieux gentleman dans la voiture de première classe où monta Margaret lorsque le train pour Shorncliffe eut été préparé, et comme ce compagnon de voyage dormit tout le long du chemin, le visage couvert par un vaste mouchoir de soie, Margaret put s’abandonner sans contrainte à ses propres pensées.

La jeune fille n’était guère moins paisible que son compagnon endormi ; elle demeura dans une attitude immobile, les mains croisées sur ses genoux, et le regard toujours fixe comme lorsqu’elle était sur le quai,