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HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

— Pas de preuves ? Oh ! père, vous ne savez pas… vous ne savez pas. Ils ont été à Winchester. C’est par la mère de Clément que j’ai su qu’ils étaient allés là, et je les ai suivis. J’ai trouvé le lieu de leur demeure… c’était à l’hôtel où vous étiez descendu… quand vous avez refusé de me recevoir. J’attendis dans la rue, et le soir je les vis sortir. Père, je savais qu’ils ne pouvaient avoir qu’un but en venant à Winchester. Je les vis le soir du premier jour ; et le lendemain je les guettai de nouveau… attendant dans la rue et me cachant sous les portes ou dans les boutiques quand il y avait quelque danger que je fusse aperçue. Je vis Clément quitter l’Hôtel George, et se diriger vers la cathédrale. Je me rendis à sa suite dans la cour de la cathédrale, et je vis l’homme causant sous un porche avec un vieillard. Je rôdai aux alentours, et je vis l’homme partir dans la direction des prairies, vers le petit bois, à l’endroit où…

Elle s’arrêta et fut prise d’un tremblement si violent qu’elle ne put continuer.

Wilmot versa pour la seconde fois de l’eau-de-vie dans le verre et le porta aux lèvres de sa fille. Elle en but à peu près la valeur d’une cuiller à café, puis elle reprit, parlant rapidement et par phrases interrompues :

— Je suivis l’homme en me tenant à une assez grande distance afin qu’il ne s’aperçût pas qu’il était suivi. Il se dirigea directement vers l’endroit… où le meurtre a été commis. Il y avait en cet endroit Clément et trois hommes. Ils étaient là sous les arbres et s’occupaient à draguer la rivière.

— À draguer la rivière !… Grand Dieu !… et pourquoi faire ! — s’écria Wilmot se laissant tomber sur une chaise et devenant livide.

La peur s’emparait enfin de lui pour la première fois depuis l’entrée de sa fille. Jusque-là il avait écouté