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HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

sous les ormes… tout le jour… tout le jour… mais cela me parut durer une éternité. Je fus obligée de me cacher… de me tenir à distance, car Clément était toujours là ; mais quand la nuit tomba, je m’aventurai plus près et je vis ce qu’ils faisaient et qu’ils n’avaient pas encore trouvé ce qu’ils cherchaient ; mais je ne savais pas encore ce qu’ils voulaient trouver.

— Mais l’ont-ils enfin trouvé ? — s’écria le père ; — l’ont-ils trouvé ?… Dis-le-moi sans tarder.

— Oui, ils finirent par le trouver. Un paquet de haillons, à ce que me dit un petit garçon… un petit garçon qui avait passé la journée avec eux… « Cela avait l’air d’un paquet de haillons, » me dit-il ; mais il a entendu dire au constable que ces haillons étaient les vêtements de l’homme assassiné.

— Et puis ?… et puis ?

— Je ne tardai pas davantage, père. Je courus à la station de Winchester… j’arrivai à temps pour le train qui va à Londres… je pris l’express pour Rugby… et…

— Oui, oui, je sais… et tu es une brave fille, une noble enfant. Ah ! ma pauvre Margaret, je ne crois pas que j’aurais autant haï cet homme si je n’avais pas pensé à toi… à ton enfance abandonnée… à ta vie sans avenir et sans joie… et dont il était la cause, lui qui, dès le début de ma vie, m’avait perdu sans retour. Mais ce n’est pas le moment de causer… puisqu’ils ont trouvé les vêtements… ils savent que l’homme qui a été assassiné était Henry Dunbar. Ils ne vont pas tarder à venir… Voyons… voyons… comment me dérober à leur poursuite ?

Il saisit son front à deux mains comme si sous cette étreinte de fer il pouvait rassembler ses idées et y rétablir un peu d’ordre.

Depuis le jour où il avait pris possession des biens de sa victime jusqu’à ce moment il avait vécu dans une