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HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

Le cheval faisait voler le sable humide sous son pied, et rongeait son frein dans l’impatience que lui causait tout ce retard.

— Je ne sais pas, — répondit Wilmot ; — cela dépendra de… je ne sais quoi. Bonne nuit, Margaret. Dieu te bénisse ! Je ne pense pas que Dieu écoute les prières de mes pareils. S’il les écoutait, les choses se seraient passées autrement… lorsque j’ai essayé de mener une vie honnête !

Oui, c’était la vérité, le meurtrier de Dunbar avait essayé de mener une vie honnête et avait prié Dieu de protéger son honnêteté. Mais ses efforts avaient été empreints d’une impatience puérile ; il s’attendait à ce que ses prières fussent exaucées aussitôt que formées, et il s’indignait de ce que la Providence semblait sourde à ses vœux. Il lui avait toujours manqué la résignation, cette qualité sublime qui supporte sans murmures les mauvais jours et fait tête à l’orage avec calme et le sourire aux lèvres.

— Père, laissez-moi vous accompagner, — dit Margaret d’une voix suppliante ; — permettez-moi d’aller avec vous. Sans l’espérance que Dieu vous pardonnera, qui me soutient, le monde serait vide pour moi. Il faut que je vous accompagne. Je ne veux pas que vous retourniez parmi des hommes méchants qui vous endurciront le cœur. Je veux vous accompagner, bien loin, partout…

— Toi… m’accompagner ?… — dit lentement Wilmot. — Est-ce bien… ton désir ?

— C’est le plus grand désir de mon cœur !

— Et tu seras fidèle, — s’écria-t-il en s’inclinant, et mettant la main sur l’épaule de sa fille et la regardant en face ; — tu seras fidèle, n’est-ce pas, Margaret ? fidèle comme l’acier, prête à tout et tu regarderas sans faiblir, sans trembler, venir l’heure du danger. Tu as déjà supporté beaucoup et tu l’as noble-