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HENRY DUNBAR

taient par divers appareils gisant sur les meubles ou accrochés à des patères, et surtout par une collection de pipes et de boîtes à cigares placées sur la cheminée.

La jeune fille ouvrit la porte d’un petit placard dissimulé dans un coin derrière le lit, mais au lieu de visiter cette nouvelle cachette, Carter se précipita sur la porte, la ferma à double tour, et mit la clef dans sa poche.

— Merci, mademoiselle l’innocente, — dit-il, — je ne tiens pas à me tordre le cou ou à me casser les reins en regardant dans vos armoires. Veuillez seulement venir ici.

Et Carter indiqua la fenêtre près de laquelle il se plaça.

La jeune fille obéit sans s’effrayer. Sans sa fluxion ou plutôt sans le mouchoir de couleur qui lui cachait le bas du visage et qui était attaché par un gros nœud sur sa tête, c’eût été une assez jolie personne. Telle qu’elle était, Carter put voir seulement qu’elle avait de beaux yeux noirs qui se baissèrent devant son regard.

— Vous m’avez l’air d’une fine mouche, — dit-il, — et votre fluxion me confirme dans cette idée. Voyons, qu’est-ce que votre maître vous a dit, il n’y a qu’un instant ? À quel propos faut-il que vous vous taisiez, hein ?

Betty baissa la tête et tordit le coin de son tablier.

— Mon maître ne m’a pas rien dit, monsieur, — dit-elle.

— Ah ! mon maître ne m’a pas rien dit ! Votre moralité et votre connaissance de la grammaire peuvent aller de pair, mademoiselle Betty ; mais prenez-y garde, il pourra vous en cuire tôt ou tard, et vous serez tout étonnée d’être arrêtée pour parjure. C’est un crime qui est puni de la déportation pour la vie en ce qui concerne les femmes, — ajouta-t-il d’un ton effrayant.