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HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

CHAPITRE XLII

Sur la piste.

Le voyage en chemin de fer de Shorncliffe à Derby était loin d’être agréable par une froide nuit de printemps, par des ténèbres opaques couvrant la plaine comme d’un suaire, et par un vent mélancolique gémissant sur ces régions désolées où tous les trains de nuit semblaient s’être donné rendez-vous. Lorsque je regarde par la portière d’un wagon cette étendue de pays plat et sombre, au milieu de la nuit, il me semble parcourir un pays maudit évoqué par quelque puissant magicien, un désert affreux de l’Afrique centrale transporté là pour rendre l’hiver encore plus affreux, et que le premier cri du coq fera évanouir.

Carter ne voyageait jamais sans une couverture de voyage et un flacon d’eau-de-vie, et soutenu par ces deux réconfortants, extérieur et intérieur, contre l’influence glaciale d’une longue nuit, il s’installa dans l’angle d’un wagon de seconde classe et se disposa à passer le temps le plus agréablement possible.

Heureusement pour lui l’agent était accoutumé à la vie qu’il menait. Comparé à certaines de ses couchettes, l’angle capitonné d’un wagon de deuxième classe valait le lit d’un hôtel. Il s’était fait au sommeil interrompu dans tous les endroits possibles, et trois minutes après que le conducteur du train eut fermé la portière, il ronflait de tout son cœur.

Mais il ne put jouir longtemps de son repos. La por-