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HENRY DUNBAR

quart ; le train devait arriver à Rugby à six heures moins dix ; à huit heures moins un quart à Londres ; la malle de Douvres partirait de la station du pont de Londres à huit heures et demie, et à sept heures et demie environ du matin Dunbar parcourrait les rues de Paris.

Et puis ? Son voyage devait-il se terminer dans la brillante cité ou le conduire plus loin ? C’était la question cachée dans le cœur du voyageur. Dans les meilleurs moments de sa vie il ne s’était jamais montré très-communicatif, mais ce soir-là il était comme un homme dont l’âme eût été accablée par le poids d’un projet qui devait être achevé à quelque prix que ce fût.

Il ne pouvait entendre les noms des stations, il ne pouvait entendre que les sons gutturaux et inarticulés que rugissent dans les ténèbres les employés du chemin de fer au grand étourdissement des infortunés voyageurs. Son incapacité de distinguer les noms des stations lui était désagréable. Le temps d’arrêt de chaque station l’exténuait comme si cette pause eût été l’intervalle fatigant d’une heure. Il était assis sa montre en main, car à chaque instant il était pris de la terreur soudaine que le train avait déraillé et qu’il se traînait lourdement en dehors des rails.

Qu’arriverait-il si on n’atteignait Rugby qu’après le départ de l’express de Londres ?

Dunbar s’informa auprès d’un voyageur si le train était toujours exact.

— Oui, — répondit le voyageur froidement. — Je crois qu’il est généralement assez régulier, mais je ne sais pas l’effet que peut produire la neige sur la locomotive. Il y a eu des accidents dans certaines parties de ce pays.

— À cause de l’épaisseur de la neige ?

— Oui, c’est ce que je voulais dire.