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HENRY DUNBAR

ment, un grondement plus fort que le tonnerre et plus hideux que le fracas du canon contre les remparts de bois d’un vaisseau de guerre.

Cet horrible bruit fut suivi de hurlements aussi effroyables, puis il n’y eut plus que mort, terreur, obscurité, angoisses et confusion : des masses éparses de morceaux de bois et de fer amassés dans un épouvantable chaos sur la neige tachée de sang ; des gémissements humains étouffés sous des débris de wagons renversés ; les pleurs des mères dont les enfants s’étaient échappés de leurs bras pour tomber sous l’étreinte de la mort ; les lamentations pitoyables d’enfants cramponnés encore vivants au sein de leurs mères mortes, victimes du sinistre ; des maris séparés de leurs femmes, des femmes appelant avec désespoir leurs maris, et au milieu de tout cela des hommes de cœur, la face blême, se précipitant çà et là avec des lampes dans leurs mains, plusieurs d’entre eux, à moitié mutilés et blessés, mais oublieux de leurs souffrances dans leur sollicitude à porter secours aux malheureux qui les entouraient.

L’express se dirigeant vers le Nord s’était rencontré avec le train venant de Shorncliffe qui était arrivé sur la grande ligne en retard de neuf minutes.

Un à un les morts et les blessés furent enlevés de ce grand amas de ruines ; un à un ces corps inanimés furent transportés par d’impassibles porteurs qui remplissaient paisiblement et imperturbablement leur devoir dans cette scène hideuse de carnage et de confusion. Le grand but à accomplir était de déblayer sans retard la voie, et le bruit des pioches et des pelles éteignit presque les autres clameurs terribles, les pitoyables gémissements des victimes qui étaient assez peu blessées pour avoir conscience de leurs souffrances.

Le train de Shorncliffe avait été complètement écrasé. Le train express du nord avait beaucoup moins