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HENRY DUNBAR

femme souffre de quelque affection morale, qu’elle refuse de faire connaître à ses amis. Si vous pouviez l’amener à causer avec vous, ce serait, sans aucun doute, une excellente chose pour elle. Si c’était une personne ordinaire, elle pleurerait, et le soulagement occasionné par les larmes produirait un excellent effet sur son esprit. Mais notre malade est loin d’être une personne ordinaire. Elle a une volonté très-forte.

— Margaret, une forte volonté ! — dit Clément avec un regard surpris ! — mais c’est la douceur même.

— Très-vraisemblablement, mais néanmoins elle a une volonté de fer. Je l’ai suppliée de me parler ; le son de sa voix eût pu être un faible diagnostic de son état ; mais j’aurais tout aussi bien fait de supplier une statue. Elle ne faisait que secouer doucement la tête, et jamais elle n’a voulu me regarder. Cependant je vais vous envoyer un calmant, qu’il serait bon de lui faire prendre tout de suite, et demain matin je viendrai la voir.

Vincent quitta le Grand-Cerf, et Clément retourna à la chambre de sa mère. Cette affectueuse mère était prête à sympathiser avec toutes les inquiétudes qui affectaient son fils unique. Elle sortit de la chambre de Margaret pour rejoindre Clément.

— Est-elle toujours dans le même état, ma mère ? — demanda-t-il.

— Oui, exactement le même. Voudriez-vous la voir ?

— Oh ! oui.

Mme Austin et son fils passèrent dans la chambre voisine.

Margaret était couchée tout habillée dans cette robe boueuse qu’elle portait dans l’après-midi, et qui pendait d’un côté du lit. L’aspect pétrifié de son visage remplit l’esprit de Clément d’une épouvantable terreur. Il commença à craindre qu’elle ne devînt folle.