— Non, ma chère, pas sur Érasme et sur Galilée. Je savais la semaine dernière tout ce qui concernait Érasme ; maintenant c’est Galilée seul dont je m’occupe. Je fais un extrait de dix pages de tout ce qui a été publié à ce sujet. Je ne demande pas aux autres de se rappeler ce que j’écris, et ne suis pas obligé de m’en souvenir moi-même. Ce ne sont pas des choses destinées à durer. Il reste bien, sans doute, un dépôt au fond du cahier de notes ; mais l’effervescence de la cuvée ne tarde pas à s’évaporer.
— Tout ce que je sais, c’est que vous êtes un homme très-instruit, et que l’on trouve dans vos écrits une immense quantité de choses intéressantes, dit Charlotte.
— Oui, ma très-chère, il y a une sorte de vin qu’il faut convertir en negus[1], pour de jolies buveuses comme vous. Le vin de Cypris, comme l’appelait Mme Browning. Il vaut mieux, pour les jeunes filles, boire du negus, que rien du tout. Quant à moi, ma très-chère, le sort m’a favorisé, j’aime les lettres. Je suis certain que de tous les modes d’instruction il n’y en a pas de meilleur que celui de compiler les livres. Un homme qui commence par des compilations, à moins qu’il ne soit bouché ou imbécile, doit finir par être en état d’écrire lui-même des livres. Ainsi donc vous pouvez espérer qu’il viendra un moment où votre Valentin aura quelque réputation pendant quinze jours. Qui est-ce qui peut espérer plus de quinze jours de réputation par ce temps de vie à la vapeur ? »
Pendant cette période de tranquillité, durant laquelle Haukehurst cultiva alternativement la société des Muses
- ↑ Negus, boisson composée de vin de Porto, d’eau, de citron, de muscade, de cannelle, et de sucre