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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

enfin, plein de vie et de gaieté, ayant beaucoup à dire sur Paris en général et fort peu sur ce qui le concernait en particulier.

Les femmes le questionnèrent sans miséricorde : elles exigèrent une description détaillée de tous les locataires féminins de la pension bourgeoise et voulurent à peine croire que toutes, à l’exception de la petite maîtresse de musique, étaient vieilles et laides.

Au sujet, de la maîtresse de musique elle-même, elles furent disposées à avoir des soupçons et elles ne furent pas complètement rassurées par l’affirmation de Gustave qu’elle n’était pas séduisante, ni jolie.

« C’est une chère, bonne, laborieuse petite personne, dit-il, qui travaille plus que moi ; mais elle est loin d’être un miracle de beauté et sa vie est si pénible, que je m’étonne souvent qu’elle ne préfère pas aller vivre dans un couvent. Ce serait plus gai et plus agréable pour elle que de vivre avec ces vieilles créatures à la Pension Magnotte.

— Je présume qu’il y a beaucoup de jolies femmes à Paris ?… dit Cydalise désireuse d’arriver au nœud de la question.

— Vraiment, je crois qu’il y en a, répondit Gustave avec franchise ; mais nous autres étudiants, nous n’en voyons pas beaucoup au quartier. Par-ci par-là une ouvrière, même une blanchisseuse pas trop mal, pas souvent… des grisettes enfin ! ajouta le jeune homme en rougissant un peu, bien que ce ne fût pas pour son compte. Nous apercevons quelquefois un joli minois qui passe en voiture, car à Paris, les belles femmes ne vont pas à pied. En somme, j’ai vu de plus jolies jeunes filles à Vire qu’à Paris. »

Cydalise fut enchantée de cette confession.