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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

CHAPITRE II

SEULE DANS LE DÉSERT DU MONDE

Gustave revint à son ancienne façon de vivre ; il ne fut pas très-distrait par l’idée de sa grandeur future comme seigneur de Beaubocage et Cotenoir.

Il sentait quelquefois comme un poids qui oppressait son esprit ; en en recherchant la cause, il trouva que ce poids était Madelon Frehlter.

Il continua néanmoins à le porter légèrement et à jouir de sa liberté d’étudiant, sans trop penser à l’avenir.

Il expédia des compliments polis à Mlle Frehlter dans ses lettres à Cydalise ; il reçut de Cydalise force informations mieux rédigées qu’intéressantes au sujet de la famille de Cotenoir.

C’était le court été de sa jeunesse, mais, hélas ! combien était proche le sombre hiver qui viendrait glacer son cœur joyeux et franc ! Ce cœur si compatissant, si tendre aux misères du sexe féminin allait être attaqué par son côté le plus faible.

Gustave avait l’habitude de traverser tous les matins le jardin du Luxembourg, en allant à l’École de Droit ; quelquefois, lorsqu’il était plus matinal que de coutume, il emportait un livre et parcourait, en lisant, une des allées les plus sombres, en attendant l’heure du cours.

Comme il se promenait un matin avec son livre, un