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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

Quelques réflexions suffirent pour faire comprendre à Gustave qu’un mariage entre lui et Susan était impossible en France.

Il lui expliqua et lui demanda si elle voulait avoir confiance en lui, comme elle avait eu confiance en Kingdon.

Leur mariage pourrait être aisément régularisé à Jersey : voulait-elle se rendre avec lui à Jersey, pour y séjourner aussi longtemps que l’exigeait la loi anglaise pour régulariser, rendre valable leur union ?

« Pourquoi prendriez-vous tant de peine pour moi ? avait répondu Susan de sa voix basse et triste, vous êtes trop bon, trop généreux. Je ne mérite pas ce que vous voulez faire pour moi.

— Cela veut-il dire que vous n’avez pas confiance, Susan ?

— Je me fierais à vous dans un désert, à mille lieues du genre humain, ma vie fût-elle plus heureuse qu’elle n’est. Je n’ai dans le cœur d’autre sentiment que de l’amour pour vous, de la foi en vous. »

Après cela le reste était facile.

Les deux amants quittèrent la Pension Magnotte, par une belle matinée d’été, et se mirent en route pour Jersey, où après quinze jours de résidence, un pasteur de l’église protestante les unit pour l’éternité.

Susan était protestante et Gustave catholique ; mais la différence de religion ne les divisa pas plus que la différence de nationalité.

Ils revinrent à Paris aussitôt après le mariage et Lenoble prit un très-modeste logement pour lui et sa femme dans une petite rue très-sale à côté du Panthéon ; un quatrième étage très-pauvrement meublé.

Lenoble s’était procuré lui-même, l’occasion de dé-