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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

montrer la vérité de cet adage : « Quand il y a assez pour un il y a assez pour deux. »


CHAPITRE IV

DÉCRET DE BANNISSEMENT

Aux fortes émotions qui accompagnent l’accomplissement d’un acte téméraire succède souvent dans l’esprit des hommes un calme plat.

La faible voix de la Sagesse qui n’a pu se faire entendre pendant que la tempête faisait rage, chuchote de sages conseils ou de doux reproches ; la Folie qui envisagée à travers le nuage orageux, à la sublime clarté des éclairs, a semblé être une inspiration, se voile la figure à la sublime clarté du jour.

Que l’on ne suppose pas un seul instant que le temps et la réflexion aient pu apporter aucun changement dans la conduite de Lenoble.

Il n’en fut pas ainsi.

L’amour qu’il ressentait pour sa femme n’était pas une émotion d’un jour : c’était une passion profonde et forte comme la destinée.

La pire chose que ses arrière-pensées purent lui révéler, c’est que l’acte qu’il avait fait était des plus téméraires.

Devant lui se dressait une imposante nécessité… la nécessité d’aller à Beaubocage, pour dire à ceux qui l’aimaient comment leurs châteaux en Espagne allaient s’écrouler, rouler dans la poussière.