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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

Tout avait mal tourné pour lui.

Il avait cherché à se faire un sort comme avocat à Paris, à Caen, à Rouen ; mais les clients n’étaient pas venus.

Il avait travaillé comme employé dans plusieurs maisons de commerce.

Susan et lui avaient vécu comme ils avaient pu pendant les sept années qui s’étaient écoulées depuis leur mariage.

Ils avaient l’un pour l’autre une affection que chaque nouveau chagrin semblait accroître ; l’amour même ne parut jamais disposé à déployer ses ailes pour s’enfuir par la fenêtre, bien que la misère vînt chaque jour frapper à leur porte et s’asseoir à leur foyer comme un hôte inévitable et familier.

La mère et la sœur s’ingéniaient pour venir en aide au malheureux réprouvé, en ramassant les miettes de leur pauvre ménage !

Le vieillard, aigri par la douleur, était devenu, en vieillissant, d’une avarice sordide, et la vie des deux femmes était aussi douloureuse que sans espoir.

Par d’innocents mensonges, de légers artifices, de petites falsifications dans leurs comptes, elles parvenaient à grappiller de temps en temps quelques louis pour les envoyer à l’exilé aux abois.

Elles trouvaient aussi moyen de correspondre secrètement avec Gustave, et elles furent informées de la naissance de son fils.

« Ah ! si tu voyais comme il est beau, » écrivait le père, « cet enfant du pur et véritable, amour, tu ne regretterais pas plus longtemps mon manque de foi envers Madelon Frehlter. Je ne savais pas jusqu’à