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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

Il est possible qu’avant d’appeler Nancy à venir reprendre son ancienne place à son foyer, Sheldon avait examiné la question avec toutes ses conséquences, et avait considéré la vieille femme comme liée à lui par un lien difficile à briser, les liens de cet esclavage étroit né de la nécessité.

« Quel choix peut-elle avoir, si ce n’est entre ma maison et le workhouse ? avait-il dû naturellement se demander ; et est-il probable qu’elle chicane sur le pain et le beurre pour tomber au pain tout sec ? »

Sheldon, en examinant la question et toutes celles qui s’y rattachaient à son point de vue, pouvait raisonnablement avoir conclu que Mme Woolper ne pouvait rien faire qui fût en opposition avec ses intérêts, et que tant qu’elle aurait bénéfice à rester chez lui et à le servir, elle demeurerait son esclave docile et obéissante.

L’influence de l’affection, la force d’une impulsion généreuse, étaient des qualités qui ne pouvaient pas entrer dans les calculs de Sheldon. Ses additions, ses soustractions, ses divisions étaient toutes basées sur un seul système.

L’art heureux et inconscient par lequel Charlotte se rendait chère à tous ceux qui la connaissaient eut bientôt son effet sur la vieille gouvernante.

L’aimable considération de la jeune fille pour son âge et ses infirmités, l’affectueuse familiarité avec laquelle elle traitait cette vieille campagnarde, qui avait connu son père et qui pouvait lui parler du comté d’York et des gens du comté d’York, eurent bien vite trouvé le chemin du cœur de Nancy.

La visite de Mlle Halliday à la chambre de la gouvernante, quand elle était chargée de quelque message de sa mère, et une petite causerie de quelques minu-