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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

gée par tout le monde médical. Le choix que j’ai fait de cet habile praticien pour traiter Charlotte a été guidé par sa réputation qui est aussi bien établie comme médecin que comme homme consciencieux. Ses opinions sont aussi profondément raisonnées qu’elles sont dignes d’inspirer confiance.

— Ses opinions ! s’écria Valentin avec un rire amer. Au nom du ciel, qu’appelez-vous ses opinions ?… Les seules opinions que j’ai pu tirer de lui ce matin n’étaient que l’écho des vôtres. Et l’homme en lui-même ?… J’ai pris sa mesure avant de lui adresser mes questions, et la physiologie est une science menteuse, ou cet homme n’est pas autre chose qu’un imposteur !

— Sa position répond à cette appréciation.

— Sa position ne répond à rien. Il n’est pas le premier imposteur qui ait acquis une position, et très-probablement il ne sera pas le dernier. Il faut me pardonner, si je parle avec un peu de violence, monsieur Sheldon. Mes sentiments sont trop profonds pour que je puisse me rappeler les convenances de ma position. La chère fille qui est entre la vie et la mort est ma future. Comme votre belle-fille, elle vous est très-chère, je n’en doute pas, et vous êtes anxieux de faire votre devoir. Mais elle est tout au monde pour moi, mon doux souvenir du passé, mon seul espoir pour l’avenir. Je ne veux pas la confier aux soins du docteur Doddleson, je revendique le droit de lui choisir un autre médecin, qui s’adjoindra à celui qui a votre confiance, s’il le faut, je n’ai pas l’intention d’offenser le médecin de votre choix.

— C’est une complète absurdité, dit Sheldon.

— C’est une absurdité qu’il faut me passer, répliqua Valentin d’un ton résolu. L’enjeu de la partie est trop