Page:Braddon - La Trace du serpent, 1864, tome II.djvu/278

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
272
LA TRACE

n’ait pris parfaitement soin de lui. Les de Cévennes ont toujours pris soin d’eux-mêmes ; c’est un trait de famille.

— Il s’est montré digne de cette famille alors. On le jeta dans une rivière, mais il ne s’y noya pas ; il fut placé dans une maison de refuge et élevé comme un pauvre, mais par la force de sa volonté et le secours de son intelligence, il se tira d’embarras et se fraya un chemin dans le monde ; il se fit, ce que son père avait été avant lui, professeur dans une pension ; il se fatigua de cette position comme son père, et quitta l’Angleterre pour venir à Paris ; à Paris, suivant l’exemple de son père, il épousa une femme qu’il n’aimait pas, pour l’amour de sa fortune ; il devint maître de cette fortune, et jusqu’à ce jour même il a surmonté tous les obstacles et triomphé de toutes les difficultés. Votre fils unique, monsieur de Cévennes, le fils dont vous avez abandonné la mère, le fils que vous avez abandonné à la faim, au vol, à la noyade ou à la potence, à mendier dans les rues, à mourir dans un ruisseau, dans un hôpital ou dans une prison, a vécu et a traversé toutes ces misères pour se trouver face à face avec vous aujourd’hui et pour vous dire que pour tous ses malheurs et pour ceux de sa mère avec toute l’énergie d’une âme que ces malheurs ont plongée dans le crime, il vous exècre !

— Ne vous emportez pas, dit gracieusement le