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DU SERPENT.

sphère, et bientôt reparut en disant qu’ils pourraient avoir des lits, mais qu’ils ne pourraient avoir une chambre particulière, parce qu’il n’y en avait pas ; ils acceptèrent cette raison comme étant excellente, et elle dit, en outre, qu’ils devaient se contenter d’une installation dans la salle du comptoir, et de ce moment la servante en savates adoucit son air maussade et méfiant, et leur dit qu’ils trouveraient l’endroit très-gai, celui-ci ayant vue sur la rivière.

M. Darley commanda une bouteille de vin, ordre extraordinaire, inouï jusqu’à ce jour dans l’établissement, en faisant observer qu’il serait enchanté si le propriétaire voulait lui-même l’apporter et perdre quelques minutes en conversation avec lui ; ils entrèrent, M. Peters et lui, dans la salle.

Elle était vide, cette salle ; le batelier était évidemment à prendre ses délices quelque autre part cette après-midi ; on voyait encore sur la table les marques humides des pots de porter pris le matin par le batelier, et les marques séchées des pots de porter du jour précédent ; on voyait les débris de sa pipe, et les cartes avec lesquelles il avait fait une partie carrée (cartes qu’il avait évidemment mâchées aux coins, quand il avait eu mauvais jeu) éparpillées de tous côtés ; on voyait l’empreinte boueuse de ses pieds sur le plancher sablé, et il existait une odeur pénétrante, mêlée d’exhalaisons de velours de coton, de tabac, d’oignons, de cuir humide et de