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LES OISEAUX DE PROIE

— Mais si vous aviez une grande fortune, Charlotte, ne pensez-vous pas que vous seriez beaucoup plus disposée à me laisser piocher à mon pupitre du British Museum ? Très-riche, vous deviendriez ambitieuse et vous laisseriez M. Sheldon vous présenter un homme qui fût en état de vous donner un grand nom, un rang… digne de vous !

— Je ne ferais rien de semblable. Je ne tiens pas à l’argent. Vraiment, je crois que je regretterais presque d’être très-riche.

— Pourquoi, ma chérie ?

— Parce que, si nous étions très-riches, nous ne pourrions plus vivre dans un cottage, et je ne pourrais plus vous faire des gâteaux pour votre dîner.

— Mon cher petit cœur ! la plus petite parcelle d’égoïsme n’entrera jamais dans votre âme pure et loyale. »

Ils arrivaient à la maison. Diana et Georgy avaient suivi les amoureux ; elles avaient parlé un peu du sermon et beaucoup de chapeaux ; la pauvre Diana faisant tous ses efforts pour avoir l’air de s’intéresser à ce qui intéressait l’inoffensive Mme Sheldon.

La conversation devint générale, toute la compagnie étant entrée dans le salon où se trouvait Sheldon, lisant son journal auprès du feu qui flambait.

« Quel profit vous autres femmes dit l’agent de change, devez tirer de votre présence à l’église ! Les Consolidés ont encore baissé de 1/8 depuis mardi soir, George, ajouta Sheldon, s’adressant à son frère qui était debout devant le feu, le coude appuyé sur le manteau de la cheminée.

— Les Consolidés sont vos « chapeaux, » papa, s’écria gaiement Charlotte. Je ne crois pas qu’il se passe un jour sans que vous en parliez, pour dire qu’ils ont été en haut, ou en bas, ou ailleurs. »