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LA VIE DE FAMILLE

Je ne puis dire tout ce que j’ai rencontré de bienveillance et de choses propres à réchauffer le cœur à Boston. La chaleur de l’âme ne manque pas ici, et l’esprit juvénile de la nation fait qu’on s’en aperçoit d’une manière très-sensible. Malheureusement, pour faire face à tout cela, je ne suis qu’un individu, mes forces et mon esprit ne suffisent pas à cette lutte. Mes seuls moments de repos à Boston ont été ceux où je roulais en voiture dans les rues pour voir divers établissements et faire des visites. Cependant ces journées avaient du charme ; à chaque instant, des personnes, des circonstances agréables, des projets, de nouveaux plaisirs survenaient, et mes amis différaient leur départ pour New-York, ainsi que notre séparation. Mon petit docteur féminin, mademoiselle Hunt, me pourchassait afin de m’emmener chez elle ; M. et madame Lowell étaient venus pour me conduire à Cambridge, mais nous étions incorrigibles, mes amis et moi. Mettant de côté les préceptes de la régularité, de la politesse la plus ordinaire, nous avions décidé gaiement et avec un peu d’orgueil innocent, de persévérer dans notre conduite, et de passer encore une couple de jours ensemble à Boston en nous abandonnant à notre laisser-aller, quand deux dépêches télégraphiques arrivèrent successivement, la première pour Marcus, la seconde pour Rebecca, portant ces mots : « Votre nourrisson est très-malade. » Et ce fut fini de toute gaieté ; des larmes d’angoisse inondaient Rebecca, Marcus, avec l’inquiétude peinte sur la figure, faisait les préparatifs du départ. Heureusement ils purent partir par le chemin de fer deux heures après, ce qui leur permettait d’être le lendemain de bon matin à Rose-Cottage ; Rebecca s’attendait à trouver son enfant mort. À l’instant même où ils partirent, Benzon vint me prendre pour me