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LA VIE DE FAMILLE

« Si nous ne pouvons pas atteindre ces grandeurs d’un seul bond, honorons-les du moins. Je ne puis pardonner à mes amis de méconnaître un noble caractère, de ne pas l’entretenir avec une hospitalité reconnaissante. Lorsque, enfin, ce que nous avons tant désiré arrive et luit sur nous comme un rayon joyeux venu du royaume céleste lointain, continuer à être grossier, sardonique, recevoir une pareille visite avec le bavardage et la méfiance des rues, c’est faire preuve d’une vulgarité qui ferme les portes du ciel. C’est confusion et véritable folie quand l’âme ne connaît plus à qui elle doit son obéissance et son culte. En quelque lieu du désert de l’existence que s’épanouisse la sainte pensée qui nous est chère, elle fleurit pour moi. Si personne ne la remarque, je la vois, je connais la grandeur de ce fait ; sa floraison est un jour férié pour moi ; et pendant qu’elle dure je cesserai mes rêveries, ma folie, mes veilles. La présence d’un pareil hôte rafraîchit la nature. Bien des yeux peuvent découvrir et honorer les vertus journalières ; bien des gens aiguillonnent le génie dans sa carrière parsemée d’étoiles ; mais lorsque l’amour qui souffre tout renonce à tout, sacrifie tout, s’est promis de passer pour un fou, un misérable dans ce monde, plutôt que de souiller ses mains par des concessions ; quand cet amour vient dans nos rues et dans nos maisons, alors les purs, ceux qui s’efforcent de monter, connaissent seuls son visage ; et l’unique marque d’estime qu’ils puissent lui donner, c’est de le reconnaître.

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« La plus haute preuve d’estime que le ciel puisse jamais accorder à l’homme, c’est de lui envoyer ces anges déguisés et calomniés. »

Émerson dit de l’amitié :

« Elle exige le milieu si rare entre la ressemblance et