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LA VIE DE FAMILLE

sistent malgré la misère et les contrariétés qu’ils rencontrent ! Ils vivent environnes de dangers, luttent contre les indigènes, souffrent du climat, du manque d’habitations, des commodités de la vie, de vivres ; ils sont malades, voient mourir des êtres chéris ; ils ont faim et froid ; mais ils persévèrent. Les habitations qu’ils viennent d’élever sont détruites ; ils en construisent de nouvelles. Pendant cette lutte contre les besoins et les adversités, sous la pluie des flèches indiennes, ils fondent leur société, leur église, font des lois, un règlement d’école, tout ce qui donne de la force à une société humaine. D’une main ils tiennent le glaive, de l’autre la charrue. Malgré le danger constant qui menace leur vie, ils songent surtout au bien-être de leurs descendants, et l’on ne peut s’empêcher d’admirer la sagesse, la pureté, l’humanité des lois qu’ils promulguent. Dans cette législation, les animaux eux-mêmes ne sont pas oubliés ; des peines sont décrétées contre quiconque les maltraitera.

Pendant les premières années, la misère des pèlerins fut quelquefois poussée au dernier degré. « J’ai vu des hommes chanceler de faiblesse, faute de nourriture, » dit un témoin oculaire.

La récolte de la troisième année ayant été abondante, il fut permis à chacun de travailler pour soi et non pour tous, comme on l’avait fait jusque-là. Ceci donna plus d’animation au travail et rendit plus vigilant. Une période de prospérité succéda à la misère, et la colonie se développa avec rapidité et vigoureusement. Au bout d’un petit nombre d’années, on disait d’elle : « On peut y rester fort longtemps sans voir un ivrogne, sans entendre jurer et sans rencontrer un pauvre. » Ceux qui survécurent à ce commencement devinrent très-vieux : il n’est pas étonnant que