gère de corps et d’esprit ; car la veille encore je m’étais sentie chiffon. Mais j’avais assez bien dormi, et j’éprouvais une certaine pais de conscience d’avoir passablement rempli mes devoirs de société à Boston. Cependant je regardai avec un soupir d’envie les poules des enclos semés le long de la route, qui étaient couchées, se passaient le bec dans les plumes, se gonflaient dans le sable au soleil ; car je pensais qu’une poule devait être plus heureuse qu’une lionne.
À Springfield, je fus invitée à dîner à l’hôtel de l’Union ; j’eus des visites de femmes et d’hommes, je fabriquai des autographes ; ensuite nous continuâmes notre vol. Le ciel s’était obscurci, il devint de plus en plus sombre, et j’atteignis New-York avec une tourmente, un ouragan complet, de la neige et de la pluie. Je trouvai à l’embarcadère le domestique et la voiture de Marcus Spring. Une demi-heure après j’étais à Rose-Cottage, et reçue de la manière la plus cordiale par mes amis, prenant le thé, et causant avec eux jusque fort avant dans la soirée.
On m’a permis de me tenir cachée au monde pendant
quelques jours ; c’est ravissant, et j’espère me remettre
parfaitement ici avant d’aller au Sud. On me laisse toute
la paix et la liberté que je veux, et la manière de vivre de
Spring, même sous le rapport de la nourriture, est simple
et saine. Mais il fait encore très-froid ici et j’aspire après
le Sud, après un autre air et plus doux. Le climat du
Massuachusett ne m’a pas été favorable ; cependant je rends
grâces à cet État des quelques journées de printemps
qu’il a données au milieu de l’hiver, de son beau ciel bleu
resplendissant, de ses ormes magnifiques dont les branches
longues et flottantes portent le petit nid de l’oriole et
le balance au vent. Je lui rends grâce de ses foyers ruraux,