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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

fait de bonne musique, on a causé dans les appartements et sur la terrasse, à l’ombre des plantes grimpantes, clématites, chèvrefeuille, roses, à l’air doux et romantique de la nuit. On dit que cinq cents personnes étaient invitées ; cette fête est l’une des plus jolies que j’aie vues dans ce pays. En général, les femmes se poudrent le visage avec du blanc, puis l’enlèvent, ce qui donne momentanément à la peau une apparence de velours, mais elle n’en devient ensuite que plus jaune. La forte chaleur rend, dit-on, cette habitude nécessaire. Je n’ai rien contre elle, pourvu qu’on ôte bien la poudre ; cela se fait souvent d’une manière imparfaite. Je présume que ce fard est un héritage de la vieille France.

Je me suis promenée encore une fois avec madame Hollbrook dans les bosquets de myrtes de Belmont, et j’ai eu avec elle une fête de l’esprit. J’ai vu aussi le jeune et spirituel missionnaire Miles : visage pâle, rempli d’expression, regard qui pénètre profondément ; mais, hélas ! il ne pénètre pas plus avant que la plupart des autres dans le cœur de la grande question. Sur d’autres sujets, le vol énergique et libre de sa pensée m’a plu. J’ai été invitée un soir chez madame Hollbrook pour y voir divers membres âgés de sa famille. J’y ai trouvé deux vieilles femmes célibataires et propriétaires de quelques belles îles sur les côtes de la Caroline, où elles vivent au milieu de leurs nègres (dont elles sont les conseillères, les institutrices) et dans la meilleure intelligence avec eux.

Il est une invitation que je regrette de ne pouvoir accepter, du moins cette fois : c’est celle d’un monsieur Spalding, homme riche, âgé, et qui, dans la belle île où il demeure, laisse croître les palmettes en liberté, les esclaves noirs travailler librement, guidés seulement par la loi