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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

émigrants qui arrivent d’Europe à New-York malades ou la bourse vide. Cette île s’appelle « Wards-Island, » et l’établissement « l’Asile des émigrants. » L’un de ses principaux fondateurs et administrateurs est M. Colden, autrefois l’un des premiers légistes de New-York, et riche maintenant ; il s’occupe des institutions de bienfaisance et leur consacre son temps et sa fortune. J’étais dans sa voiture, ainsi que madame Skeyler et Bergfalk, que j’ai entrainés avec nous. Arrivés sur le port, nous nous embarquâmes ; et cette course en bateau, sur des eaux calmes et odoriférantes (jamais je n’en ai trouvé de parfumées comme celles-ci), à la chaleur d’un soleil d’automne, était des plus agréables. On juge approximativement, à Wards-Island, des fortes dépenses que les Américains ont à faire pour recevoir la population pauvre et souvent la plus misérable de l’Europe, et des moyens qu’ils emploient pour y subvenir. Des milliers d’individus, couverts de haillons et malades, sont amenés ici, soignés, habillés, nourris, puis envoyés à l’ouest, dans les États du Mississipi, s’ils n’ont pas de parents ou d’amis plus rapprochés chez lesquels ils puissent aller. Des maisons spéciales ont été bâties pour les malades du typhus, pour les ophthalmies, les enfants malades, les convalescents, les femmes en couches ; plusieurs autres étaient en construction. Sur ces vertes collines, caressées par les vents moelleux de la mer, les malades doivent nécessairement se rétablir, quand la chose est possible, et les faibles se fortifier. Nous visitâmes les malades — des centaines avaient le typhus, — et les convalescents, assis à la bonne et substantielle table où ils dînaient. « Mais si vous leur donnez tous les jours une soupe et des viandes comme celles-ci, dis-je à M. Colden, vous devez avoir de la peine à les faire