suite à côté. La femme de Hawkins avait fini par se fatiguer de l’inconduite de son mari, et cherchait à pourvoir par son travail aux besoins de ses enfants plus jeunes. La petite Hanna (elle n’avait que dix ans) ne se fatigua pas de soigner son père et de lui prouver son amour filial. Quand Hawkins s’éveillait le matin, il avait l’habitude d’envoyer sa fille lui acheter de l’eau-de-vie. Hanna obéissait lorsque ses prières ne pouvaient le décider à y renoncer, et parvenait ainsi à éveiller en lui un sentiment plus fort de son indignité. Désireux de s’en distraire, il se levait et retournait — au cabaret. La vie de Hawkins fut pendant longtemps une succession de misères et de reproches qu’il s’adressait, interrompue seulement par une nouvelle ivresse.
Sa famille avait fini par tomber dans une profonde pauvreté ; elle augmentait tous les jours. Un matin, Hawkins, malade de corps et d’esprit par suite de l’ivresse de la veille, s’éveilla dans son lit et ordonna comme d’habitude à Hanna d’aller lui chercher de l’eau-de-vie. Elle refusa en disant avec instance : « Pas aujourd’hui, cher papa ! » et elle pleura. Hawkins en colère lui commanda de se retirer, se leva, et se dirigea en chancelant vers son cabaret. Mais il s’y etait passé une scène étrange et difficile à expliquer si l’on n’admet pas une intervention supérieure. Les ivrognes étaient déjà assis auprès des bouteilles pleines lorsque l’un d’eux dit : « C’est cependant bien extravagant de notre part de nous tenir ici et de nous détruire pour engraisser ce porc ! » (Ils entendaient par là le cabaretier.) Les autres furent du même avis ; l’un d’eux ajouta : « Si à partir de ce jour nous renoncions à boire ?… » Une parole en amena une autre ; et ces hommes formèrent sur-le-champ une société, dressèrent un écrit par lequel ils s’en-