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LA VIE DE FAMILLE

liers ; des trembleurs tournaient sur eux-mêmes comme les fakirs, jusqu’au moment où ils tombaient à terre sans connaissance et dans des extases convulsives, ce qui n’a plus lieu que rarement, dit-on, ou bien on veille à ce que le public n’en soit pas témoin. L’élément pratique économique, qui distingue l’enthousiasme religieux de la secte des Trembleurs, paraît avoir pris le dessus dans ces derniers temps.

La cérémonie finit tranquillement comme elle avait commencé. Les frères et les sœurs emportèrent leurs bancs, et sortirent ensuite de la salle chacun de son côté. Mais j’étais décidée d’en apprendre davantage sur cette secte et son intention ; c’est pourquoi je me suis mise à la recherche de quelques uns de ses administrateurs ; je leur communiquai mon désir et demandai la permission de revenir pour causer avec eux. Ils y consentirent amicalement, me prièrent même de rester, puisque j’étais sur place, m’invitèrent à dîner et à rester jusqu’au lendemain. Je ne pus accepter leur invitation, car j’attendais mes jeunes amis les Lowell. Après avoir dîné avec Marcus et Rébecca à New-Libanon, je revins avec eux au village des Trembleurs. Il y régnait un calme profond ; tous les étrangers étaient partis, et les maisons jaunes, solitaires, sur les hauteurs verdoyantes, étaient éclairées par le soleil.

Nous fûmes reçus par deux sœurs qui nous conduisirent dans une chambre, où deux femmes d’un certain âge, ainsi que quelques jeunes filles, se trouvaient. Les joues de ces dernières fleurissaient comme des roses sous leurs bonnets blancs de linon empesé, et je m’aperçus que la société des Trembleurs n’envoyait pas ses plus jolis membres à la danse. Les hommes et les femmes âgés étaient ce qu’on appelle ici des Anciens et les administrateurs de la famille chez la-