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LA VIE DE FAMILLE

mitive, elle n’en sentait pas moins son impuissance comparée au pouvoir du Créateur. Que pouvait-elle lui donner de tout ce qu’elle avait reçu ? Son cœur rempli d’un amour, d’une douleur, d’une impatience sans limites, finit par déborder et devient le Niagara ; l’encens éternel de sa reconnaissance s’éleva de la profondeur des eaux vers le ciel. Le Seigneur le vit, et son Esprit entoura celui de la Nature d’arcs lumineux. Ceci se passa au matin de la vie terrestre ; il en est encore de même aujourd’hui. Le Niagara, c’est l’esprit de la nature qui s’élève vers le ciel, lui offre sa vie en une hymne sans paroles, et le Ciel l’entoure de la lumière et des flammes de son amour divin.

Le Niagara, c’est l’union de la vie terrestre avec celle du ciel. Il me l’a dit aujourd’hui ; je puis m’en éloigner maintenant, je connais son origine.

Le 10 septembre, au matin.

Nous partons aujourd’hui, j’en suis contente, car j’ai un peu mal à la tête ; le fracas incessant de cette chute, l’impétuosité continuelle du courant qui passe sous ma fenêtre, deviennent fatigants pour les nerfs. Et puis on s’habitue à tout, même à ce qui est beau, et lorsque on commence, auprès de cette merveille, à entendre, à suivre ses propres pensées sur les choses journalières, on peut s’en éloigner. Je ne t’ai pas raconté les différentes scènes de la vie près du Niagara, ni parlé du petit bateau à vapeur qui monte vers la chute jusqu’à ce qu’il en reçoive une douche et s’en retourne : de mes promenades botaniques dans l’île d’Iris, des Indiens que l’on rencontre encore, errant dans les environs ; ni du grand pont en fer, léger et fort en même