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LA VIE DE FAMILLE

J’ai assisté avec plaisir à quelques leçons, en tête desquelles je place une improvisation véritablement spirituelle du docteur Buchanan, qui a eu lieu au collége médical. Il a parlé sur l’activité du cerveau et ses rapports avec la volonté libre de l’homme. Une autre leçon faite sur Bacon de Verulam, par un M. Levermore, jeune prêtre unitaire, a été une exposition intéressante par ses aperçus profonds, impartiaux et psychologiques. Puis une autre encore, par un planteur autrefois propriétaire d’esclaves dans le Kentucky, M. Cassius Clay ; il a émancipé ses esclaves, ce qui lui a attiré beaucoup d’inimitié dans les États où règne l’esclavage. Pendant l’une de ses leçons publiques sur cette question, faite il y a un an à Louisville, je crois, il a été assailli par un homme furieux et sa bande, qui le maltraitèrent. Clay, ne s’attendant point à une pareille agression, n’avait pas d’armes sur lui. Grièvement blessé déjà de plusieurs coups de couteau, il aurait probablement succombé, si son fils, âgé de treize ans, ne s’était glissé avec courage à travers ces misérables pour lui passer un couteau de Bowie ; Clay put alors se défendre et le fit avec une telle énergie qu’il blessa mortellement son principal adversaire. Lui-même fut malade pendant près d’une année des blessures qu’il avait reçues. Lorsque je l’ai entendu, c’était la première fois depuis son rétablissement qu’il parlait en public.

La grande salle où l’on s’était réuni pour l’entendre était comble. J’avais fait sa connaissance auparavant, et il était venu chez moi ; sa personne décidée et le regard de ses yeux bleu foncé m’avaient plu, comme ses vues sur ce qu’il y a nécessairement de brute et de vil dans les États où l’esclavage est considéré comme une institution domestique, son influence fâcheuse sur les mœurs et le carac-