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Page:Bremer - La vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 2.djvu/363

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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

tère, d’où résulte le gouvernement du pistolet et du couteau Bowie. M. Clay croit qu’on peut et doit métamorphoser les nègres en travailleurs libres. Je lui demandai comment ses propres esclaves se conduisaient depuis leur affranchissement. « Très-bien, » me répondit-il. Étant peu nombreux, on les avait préparés à la liberté.

Dans sa leçon, M. Cassius Clay parla avec courage et fortement contre une « institution qui relâche tous les liens de famille, avilit la femme. » Sa polémique fut violente contre le nouveau bill concernant les esclaves fugitifs, contre Daniel Webster, qui l’avait soutenu. Il fit allusion à un tableau représentant le purgatoire : on y voit diverses espèces de pécheurs cherchant à s’échapper des flammes dévorantes ; mais un démon supérieur, avec cornes, griffes et une grande fourche à la main pour frapper et retenir toute pauvre âme sur le point de fuir, était là ; il la prenait sur sa fourche et la rejetait dans le feu. Clay reconnaissait Daniel Webster dans ce démon supérieur.

Ce fut le point saillant de ce discours, qui passait du bill des esclaves, de Daniel Webster, à la Bible et — au christianisme. Ce vigoureux combattant n’a pas fait fortune ici et s’est montré faible théologien en confondant le christianisme avec l’Église étroite qui prêche sa doctrine à rebours et ne mesure la parole de la Bible que d’après l’abus ou la fausse application qu’on en fait, ce qui est très-fréquent chez les défenseurs de l’esclavage, même parmi le clergé ; je ne suis pas étonnée de l’irritation que bien des gens éprouvent à cette occasion, et qui les pousse à méconnaître la source de la vérité quand on veut en tirer le mensonge.

La nombreuse assistance avait l’odorat fin, elle sentit une odeur de roussi et se tint silencieuse. L’orateur, reçu