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LA VIE DE FAMILLE

siane), il entra dans la chambre des représentants pour prêter serment, ne contredisait pas cette exclamation. Il était très-pâle et paraissait fort malheureux. Ce bel homme, dont le maintien est si noble, escorté, ou plutôt traîné par deux autres figures de tailles inégales qui tenaient chacune l’un de ses bras, n’était rien moins qu’agréable à voir. Les sénateurs, marchant deux à deux ou isolément, entrèrent dans la chambre des représentants, à la suite de ce groupe de trois hommes. Rien de plus simple que l’acte par lequel le nouveau président fut installé dans ses fonctions. La main sur la Bible, il promit de maintenir la constitution des États-Unis, prit Dieu à témoin de son serment, baisa le livre et — ce fut tout. Le président et les sénateurs sortirent de la chambre des représentants comme ils y étaient entrés. La plupart des sénateurs marchaient deux à deux, bras dessus, bras dessous. Clay était seul, indifférent, fatigué, très seul, à ce qu’il me parut d’après son expression et son maintien. Corvin (sénateur de l’Ohio et dont je te parlerai bientôt) marchait seul aussi ; c’est un homme de petite taille, solide, posé, agréable et bon.

Le Congrès va se reposer pendant trois jours, jusqu’après les obsèques du général Taylor. Mais les partis se préparent à une nouvelle crise dans les affaires et ne prennent pas de repos. Ils travaillent sans relâche, n’ont d’autre sentiment, ou pensée, que leur intérêt. Hier, en descendant du Capitole, j’entendis un jeune homme dire à un autre :

« S’il meurt, notre parti l’emportera ; qu’il meure donc ! »